Déblocage exceptionnel de l’épargne salariale : les précisions du Ministère du travail
L’article 5 de la loi dite « pouvoir d’achat » du 16 août 2022 (Lire notre décrypage de cette loi) prévoit une possibilité de déblocage exceptionnel de l’épargne salariale jusqu’au 31 décembre 2022.
Les droits à participation ou à l’intéressement, lorsqu’ils sont placés sur un plan d’épargne salariale, sont en effet par principe indisponibles durant 5 années.
Le Ministère du travail a précisé les modalités de ce dispositif dans un Questions/Réponses du 13 septembre 2022.
Retour synthétique sur ce Questions/Réponses.
ENTREPRISES CONCERNEES
Sont concernées toutes les entreprises disposant :
- d’un régime de participation sont concernées (régime d’autorité et régime de participation volontaire compris),
- d’un régime d’intéressement,
- d’un plan d’épargne salariale.
BENEFICIAIRES DU DEBLOCAGE EXCEPTIONNEL
Sont concernés :
- les salariés de l’entreprise quelle que soit la nature de leur contrat de travail,
- les anciens salariés,
- les bénéficiaires définis à l’article L. 3332-2 du Code du travail, à savoir notamment les chefs d’entreprises, les présidents et directeurs généraux.
EPARGNE SALARIALE CONCERNEE
SOMMES CONCERNEES PAR LE DEBLOCAGE
L’ensemble des sommes issues de la participation et de l’intéressement investies avant le 1er janvier 2022, y compris l’abondement de l’employeur qui s’y rattache ou le supplément de participation ou d’intéressement sont concernées par le déblocage.
Les sommes habituellement investies avant le premier jour de l’année, mais n’ayant été affectées que postérieurement à cette date à la suite de problèmes techniques (ex : traitement informatique défaillant) peuvent également bénéficier du déblocage exceptionnel.
Enfin, les réserves spéciales de participation calculées sur la base d’une formule dérogatoire sont également concernées.
SOMMES NON CONCERNEES PAR LE DEBLOCAGE
Le dispositif de déblocage ne peut en revanche être appliqué aux sommes suivantes :
- les sommes investies dans un plan d’épargne pour la retraite collectif (PERCO), un plan d’épargne retraite collectif ou dans un plan d’épargne retraite obligatoire,
- les actions de l’entreprise ou d’entreprises liées souscrites ou acquises à la suite de l’exercice d’options sur titres (« stock-options »), dans le cadre d’un plan d’épargne salariale, et auxquelles s’applique un délai d’indisponibilité spécifique de cinq ans,
- les sommes affectées à un fonds géré par l’entreprise (compte courant bloqué) mis en place conventionnellement, à l’exception de ceux mis en place dans les sociétés coopératives de production (SCOP) et dans les entreprises dans lesquelles la participation a été mise en place par intervention de l’inspecteur du travail (régime d’autorité),
- les sommes issues de versements unilatéraux de l’employeur effectués en l’absence de versement du salarié, ainsi que les sommes issues de versements volontaires du salarié et l’abondement qui s’y rapporte.
Conformément à la loi du 16 août 2022, ce dispositif ne concerne pas non plus les sommes investies dans un fond solidaire.
ACCORD DE L’EMPLOYEUR NECESSAIRE
CONCLUSION D’UN ACCORD
Le déblocage est subordonné à la signature préalable d’un accord conclu selon l’une des modalités des articles suivants :
- les article L. 3322-6 et article L. 3322-7 du Code du travail relatifs aux modalités de conclusion de l’accord de participation,
- l’article L. 3332-3 du Code du travail relatif aux modalités de conclusion du Plan d’Epargne Entreprise,
- l’article L. 3333-2 du Code du travail relatif aux modalités de conclusion du Plan d’Epargne Interentreprises.
Attention ! Lorsque le plan d’épargne salariale sur lequel sont versés l’intéressement ou la participation a été mis en place à l’initiative de l’entreprise, le déblocage est subordonné à une décision du chef d’entreprise, dans les cas suivants :
- lorsque l’accord de participation mis en place au sein des sociétés coopératives de production (SCOP) prévoit l’affectation des sommes à un fonds géré par l’entreprise (compte courant bloqué),
- lorsque l’accord de participation ou le règlement de plan d’épargne prévoient l’acquisition de titres de l’entreprise ou d’une entreprise qui lui est liée au sens de l’article L. 3344-1 alinéa 2 du Code du travail (groupe d’entreprises incluses dans le même périmètre de consolidation ou de combinaison des comptes) ou de parts ou d’actions d’organismes de placement collectif en valeurs mobilières (FCPE ou SICAV d’actionnariat salarié).
Par ailleurs, le Ministère du travail rappelle que ces accords doivent, comme les accords d’intéressement ou de participation, être déposés sur la plateforme Télé@ccords.
CONTENU DE L’ACCORD OU DE LA DECISION
Cet accord ou cette décision peut limiter le déblocage de certaines catégories de droits à une partie seulement des avoirs en cause.
DATE DE CONCLUSION
L’accord autorisant le déblocage peut être négocié et conclu dès l’information donnée aux bénéficiaires, soit, en théorie jusqu’au 31 décembre 2022.
Toutefois, la date de conclusion de l’accord doit permettre aux bénéficiaires de demander concrètement le déblocage.
En effet, le déblocage ne peut être réalisé qu’une fois l’accord conclu.
La conclusion d’un tel accord devrait donc intervenir en pratique avant la fin du mois de novembre.
DEBLOCAGE A LA DEMANDE DU BENEFICIAIRE
UN DEBLOCAGE NON AUTOMATIQUE
Le déblocage n’est pas automatique.
Le bénéficiaire ne peut présenter qu’une demande par organisme gestionnaire.
Il peut en revanche y avoir autant de demandes que d’organismes gestionnaires, dans la limite du plafond global de 10 000 € dont le respect incombe au bénéficiaire.
MOTIF DU DEBLOCAGE
Les sommes débloquées doivent être utilisées au soutien de la consommation des ménages et non à l’épargne.
Dans ce cadre, ces sommes ne doivent pas
- être réinvesties :
- dans des biens immobiliers locatifs,
- des produits de placement,
- des valeurs mobilières de quelque nature que ce soit (livrets, assurance-vie, actions…), :
- ni servir :
- au solde d’un crédit,
- à la clôture d’un prêt par anticipation.
- à payer des impôts.
Le bénéficiaire n’a pas à préciser pour quel bien ou service il sollicite ce déblocage auprès de son employeur. Il devra toutefois être en capacité de le justifier auprès de l’administration fiscale.
REFUS DE L’EMPLOYEUR
Le déblocage est de droit pour les sommes issues de l’intéressement et de la participation, affectées au plus tard le 31 décembre 2021 dans la limite de 10 000 €.
L’employeur ne peut donc pas refuser cette demande. Si la demande excède 10 000 €, l’employeur est en droit d’opposer un refus pour la somme excédant 10 000 €.
MODALITES DU DEBLOCAGE
PERIODE
Les entreprises doivent informer, dans un délai de 2 mois à compter de la promulgation de la loi, les bénéficiaires de leurs droits à déblocage à titre exceptionnel.
Cette information peut être faite par tout moyen.
Elle précise si le déblocage est soumis au préalable à la conclusion d’un accord et si la société a l’intention de signer un accord en ce sens.
Cette information rappelle également le régime fiscal et social des sommes concernées.
Le déblocage est réalisé dans la même période que pour la demande de déblocage. Néanmoins, si la demande du bénéficiaire est formulée à la fin de l’année 2022, il est admis que le déblocage n’ait lieu qu’en janvier 2023.
FRAIS
Les frais peuvent être pris en charge par la société.
Dans cette hypothèse, les modalités de prise en charge peuvent être prévues dans le cadre de l’accord conclu au titre du déblocage,
A défaut, les frais sont facturés aux bénéficiaires et déduits des sommes débloquées.
REGIME SOCIAL ET FISCAL DU DEBLOCAGE
Les sommes versées bénéficient des exonérations sociales et fiscales prévues pour l’intéressement et la participation en cas d’affectation à un plan d’épargne salariale.
En outre, les revenus des sommes placées et la plus-value constatée lors de la délivrance des droits sont assujettis aux prélèvements sociaux sur les produits de placement au taux de 17,2 % (CSS. L. 137-7, II, 7°).
Au titre du revenu attaché à des sommes versées dans le PEE avant le 1er janvier 2018, les taux historiques de prélèvements sociaux s’appliquent à la part des revenus et plus-values acquise ou constatée avant cette date ou au cours des 5 premières années suivant les versements intervenus du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2017.
Le précompte des prélèvement sociaux est réalisé par le teneur de compte et reversé par celui-ci aux services fiscaux.
OBLIGATION DECLARATIVE A L’ADMINISTRATION FISCALE
L’organisme gestionnaire (ou, à défaut, l’employeur), doit déclarer à l’administration fiscale le montant des sommes débloquées dans le cadre de la loi pouvoir d’achat.
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